Gréoux, une immersion dans les sous-sol d’une station thermale du sud de la France
L’établissement thermal de Gréoux-les-Bains fonctionne comme une société souterraine qui évolue à l’écart de la lumière du jour et hors du temps.
Une société où l’uniforme divise les corps ; d’un côté les blouses blanches, statiques, à leur tache et de l’autre les peignoirs roses, évoluant par centaines, corps sans visages naviguant dans ce dédale de couloirs vers on ne sait quel soin… L’enjeu du reportage est de me fondre dans ce décor et de suivre les acteurs du lieu, laisser filer les fantômes dans ce labyrinthe de pierre et suspendre le temps pour ceux qui tiennent les commandes.
Il y a un pari photographique et esthétique du travail en lumière artificielle. Je contrôle l’étape du tirage argentique pour avoir le plaisir d’orienter le regard. Je prolonge l’irréalité du lieu en jouant des dominantes colorées et j’accentue l’enveloppe de vapeur par des tirages doux. J’aime aussi relever l’incongru d’un bonnet, d’un maillot, d’une pose par contraste avec le ton monochrome de la pierre ou de la boue. Chaussée de plastique qui rend le pas feutré, je me fonds dans les bains, j’attends à l’angle d’un mur… je cale mon temps au rythme des horloges et des lumières rouges. J’assiste à la métamorphose des corps. Une déambulation sans véritable récit journalistique, un monde un peu surréaliste que je regarde évoluer presque à l’écart, peut être une métaphore, quelque chose comme l’antichambre du paradis.